La miséricorde à la lumière des saints du Carmel-Edith Stein

Editorial 

Edith Stein, sœur Thérèse Bénédicte de la Croix selon son nom de carmélite, est née en Edith_Stein 31891 à Breslau en Silésie, dans une famille juive pratiquante.
Avide de connaître, elle fait des études de philosophie et devient l’une des premières femmes à soutenir sa thèse en 1917.
Après avoir perdu la foi de son enfance, connu le mal de vivre, en lisant la Vie de Thérèse d’Avila elle découvre que la Vérité qu’elle recherche, depuis tant d’années, c’est Quelqu’un, une Présence intime, le Christ. En 1922, elle reçoit le baptême et désire être Carmélite, mais devant la souffrance que ses choix occasionnent à sa mère, elle attendra douze ans avant d’entrer au carmel de Cologne.
Solidaire du peuple juif, persécuté par les Nazis, en août 1942, elle est déportée et gazée à Auschwitz.

Ecoutons-la, à travers  ses écrits :

« Il a toujours été loin de ma pensée que la miséricorde de Dieu s’arrête aux frontières de l’Église visible. Dieu est la vérité. Qui cherche la vérité, cherche Dieu, qu’il en soit conscient ou non. »”  ( Lettre du 23 mars 1938 à sœur  Adelgundis Jaegerschmid, o.s.b.)
« Ma mère aura tenu jusqu’au bout à ses convictions religieuses. La foi inébranlable qui soutint sa vie entière ne lui aura pas fait défaut à l’heure de la mort. Je pense que cette foi lui (…) aura valu la miséricorde d’un juge près de qui elle est maintenant mon soutien le plus fidèle. Puisse-t-elle m’obtenir à moi aussi de parvenir au but.”  (Lettre du 04/10/1936 à soeur Callista Kopf, op.)

« Quelques réflexions sur la messe et l’office divin : les deux vont ensemble, ils sont inséparables. Le sacrifice de la messe est le sacrifice unique dans lequel tous les sacrifices précédents, qui l’ont préfigurés, sont accomplis, rendus présents et effectifs. C’est le sacrifice pour les péchés que l’humanité pécheresse offre par son grand-prêtre afin d’obtenir l’absolution et l’entrée devant la Face de Dieu. C’est le sacrifice de paix dans lequel les pécheurs pardonnés sont invités au banquet du sacrifice. C’est le sacrifice plénier par lequel le Christ comme tête de l’humanité et roi de la création se livre lui-même avec tout le créé à la Divinité et la plus haute Souveraineté.
Ceci est le rite de l’offertoire. Les chants de l’offertoire lui donnent expression et l’accompagnent. Les psaumes, dans la mesure où ils sont un cri des profondeurs, parlent de supplication pour la miséricorde. Les hymnes et les psaumes joyeux sont des chants de joie pour la fête nuptiale. Le Sanctus et, par­dessus tout, le Te Deum sont l’adoration, la liturgie à la fois terrestre et céleste en louange et hommage au très Saint de toute la création.
Un grand nombre de ces pensées sont inspirées du livre d’Erik Peterson sur les anges, qui contient probablement ce qu’il y a de plus décisif et profond sur le sujet. » (Lettre du 16 juillet 1935, à Mère Petra Brüning.)

Voici l’une des plus belles pages d’Edith Stein. Elle évoque le temps de prière que l’on prend chaque matin pour être disponible à la volonté de Dieu. Dans ce temps de silence, n’étant plus dans l’action, toute notre misère remonte à la surface et nous apparaît en pleine lumière.

« On ne peut échapper au jugement de celui que l’on fréquente chaque jour. Même lorsqu’aucune parole n’est échangée, on perçoit au comportement des autres ce que l’on est soi-même. On cherche à se conformer à son entourage, et si l’on n’y parvient pas la vie commune tourne au supplice. Il en est ainsi dans les rapports quotidiens avec le Sauveur. Devenant chaque jour plus sensible à ce qui lui plaît ou lui déplaît, celui qui était naguère facilement satisfait de lui-même voit tout désormais sous un autre jour. Il constate bien des laideurs, et les corrige autant qu’il est possible. Il découvre maintes choses qu’il ne peut juger ni belles ni bonnes et auxquelles cependant il lui est difficile de porter remède. Ainsi devient-il tout doucement plus petit et plus humble, plus patient, plus indulgent au brin de paille qui est dans l’œil du prochain, car il est suffisamment occupé par l’une des poutres qui sont dans le sien. Et il apprend alors à se supporter lui-même dans la lumière inexorable de la présence divine, et à s’abandonner à la miséricorde de Dieu, qui finalement, triomphe de tout ce qui nargue ses forces. » (Le mystère de Noël, L’orante, 1955, p. 55-57.)

« Jésus-Christ demande l’âme en mariage par le fait qu’il offre Sa vie pour la sienne et lutte contre Ses ennemis qui sont aussi ceux de l’âme.[…] A tous ceux qui reconnaissent leur propre culpabilité, qui la confessent avec repentir et désirent en être délivrés, il tend la main. Toutefois il attend d’eux qu’ils le suivent sans condition et en renonçant à tout ce qui en eux s’oppose à son Esprit. […]
Il ouvre ainsi les écluses de la miséricorde du Père à tous ceux qui ont le courage d’embrasser la Croix et Celui qui y est attaché. […]
Ainsi s’accomplit une nouvelle Incarnation du Christ dans la personne du Chrétien. Elle équivaut à une résurrection qui suit sa mort sur la Croix. L’homme nouveau porte lui aussi dans son corps les stigmates du Christ. Ils sont un souvenir de la misère du péché d’où il a été rappelé à la vie bienheureuse, ainsi que du prix dont celle-ci a été payée. […]
Ainsi l’union nuptiale avec Dieu, pour laquelle l’âme a été créée, est achetée par la Croix, consommée sur la Croix et scellée pour l’éternité du sceau de la Croix. » (La Science de la Croix, Nauwelaerts, 1957, p. 304-305.)

« Cette divine virginité va de pair avec une horreur intrinsèque du péché qui est l’opposé de la sainteté divine. Mais de cette horreur même du péché jaillit un amour invincible pour les pécheurs. Le Christ est venu pour arracher les pécheurs au péché et rétablir l’image de Dieu dans les âmes profanées. Il vient en tant que fils du péché, comme le montrent sa généalogie et toute l’histoire de l’ancienne alliance, et il recherche la compagnie des pécheurs, pour prendre sur lui tout le péché du monde et aller le décharger sur le bois ignominieux de la croix, qui devient ainsi le signe de sa victoire. C’est pourquoi les âmes virginales n’éprouvent aucune répulsion devant les pécheurs. La force de leur pureté surnaturelle ne connaît aucune peur de la souillure. L’amour du Christ les pousse à descendre dans la nuit comparable à la béatitude de l’âme qui peut allumer dans la nuit du péché la lumière de la grâce. Le chemin qui y conduit est la croix. Au pied de la plus profonde. Et nulle joie de mère ici-bas n’est croix, la Vierge des vierges devient la mère de la grâce. » (Exaltation de la Croix, Source Cachée p. 280)

Résonnance pour notre vie …

La prière personnelle est-elle un lieu où j’apprends peu à peu à me connaître, à m’accepter, à m’en remettre à la miséricorde de Dieu ?
Ai-je déjà expérimenté cette puissance de la miséricorde divine ?
Un apophtegme des Pères du désert dit : « quand tu vois ton frère pécher, couvre- le du manteau de ta miséricorde. » Suis-je miséricordieux pour ceux que je rencontre ?

Prière

 Qui es- tu, douce lumière, qui me remplit                                        colchique
et illumine la ténèbre de mon cœur ?
Comme la main d’une mère, tu me conduis
et, si tu me lâchais, je ne saurais faire un pas de plus.
Tu es l’espace enveloppant mon être et l’abritant en toi.
Le rejetterais-tu, il coulerait à pic dans l’abîme du néant
d’où tu le tiras pour l’élever vers la lumière.
Toi, qui m’es plus proche que je ne le suis moi-même
et pourtant insaisissable, inconcevable, au-delà de tout nom,
Saint-Esprit, éternel Amour.

(Extrait du dernier poème composé à la Pentecôte 1942)

Ce contenu a été publié dans La miséricorde à la lumière des saints du Carmel. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.