Editorial.
Qui est Jean de la Croix ? Jean de Yepes naît en juin 1542 à Fontiveros (Espagne), dans une famille pauvre. Son enfance est marquée par la souffrance : la mort de son père, puis de l’un de ses frères. Catalina et ses enfants vont connaître la misère, l’exclusion, l’errance… Arrivés à Médina del Campo, Jean a 9 ans, fréquente le Collège des enfants pauvres. Adolescent, il devient infirmier à l’hôpital. Remarqué par sa générosité, et ses aptitudes intellectuelles, il est admis au Collège des Jésuites. Rude école où se forge en lui un tempérament combatif, déterminé, serein. A 21 ans, il entre au Carmel de Médina, poursuit des études brillantes à l’Université de Salamanque…Tourmenté par le désir absolu de Dieu, et d’une plus grande solitude, il envisage d’entrer à la Chartreuse. Mais il rencontre Thérèse de Jésus (Thérèse d’Avila) qui le persuade de ne pas quitter le Carmel mais de l’aider dans sa réforme. En novembre 1568, il fonde le premier couvent des Carmes déchaux (carmes réformés) à Duruelo, et prend le nom de Jean de la Croix. Là, il s’adonne à une vie de contemplation intense et d’apostolat auprès des paysans des alentours. Jean de la Croix aura beaucoup à souffrir par les Carmes hostiles à la réforme : le cachot pendant 9 mois (c’est là qu’il écrit ses plus beaux poèmes), de lourdes charges de responsabilités, l’incompréhension de ses propres frères. Malade, épuisé, il meurt à Ubeda dans la nuit du 13-14 décembre 1591.
Ses plus grandes œuvres sont :
– La Montée du Carmel (MC)
– La Nuit obscure (NO)
– Le Cantique Spirituel (CS A et B)
– La Vive Flamme d’amour (VFl)
Il écrit ses poèmes pour exprimer et chanter sa relation vivante et vraie avec Dieu. Plus tard il en écrira les commentaires pour tous ceux et celles qui cherchent Dieu et désirent entrer dans une vie de prière, une vie d’oraison.
Jean de la Croix peut devenir le guide et l’ami de ceux qui cherchent une plus grande intimité avec Dieu, pour chacun de nous. Il l’a été pour Thérèse de l’Enfant Jésus : dans presque tous ses écrits, elle emprunte et cite Jean de la Croix (plus de 100 fois, elle connaissait très bien ses écrits).
«Où es- tu caché, Ami ?…Ah ! découvre-moi ta présence…(Cant. Spirit. B1)
Dieu nous précède et fonde la quête de notre désir de Le rencontrer :
« O Seigneur mon Dieu, qui te cherche avec un amour pur et simple, te trouvera… car c’est Toi qui te montre le premier et sors à la rencontre de ceux qui Te désirent » ( Paroles de lumière et d’amour.2 )
« Si l’âme cherche son Dieu, son Bien- Aimé la cherche avec infiniment plus d’ardeur. C’est Dieu qui, dans cette recherche, est le principal agent. C’est Lui qui doit la guider… La grande préoccupation (de l’âme) doit être de ne pas entraver l’action de l’Esprit Saint… » (Vive Flamme 3,28)
Chemin exigeant : « La croix est le bâton destiné à nous servir de point d’appui, à nous faciliter la marche… » (Mont Carmel livre2 ch.7,7)
« L’âme qui aime Dieu véritablement est prête à tout pour rencontrer le Fils de Dieu, son Bien- Aimé. Déterminée pour réussir dans sa recherche, elle pratiquera les vertus et s’adonnera aux exercices de la vie active et contemplative… La vraie manière de chercher Dieu, c’est de faire le bien en Dieu et de lutter contre le mal en soi- même…Il faut pour trouver Dieu, un cœur libre et fort, dégagé de tout mal » (Cantique Spirituel B 2/31,4)
Le Christ tient une grande place dans la vie quotidienne, dans la contem-plation et dans tous les Ecrits de Jean de la Croix. La source préférée de sa recherche et de sa vie de prière, est l’Ecriture, l’évangile de Jean…
« …le Verbe Fils de Dieu, avec le Père et l’Esprit-Saint, est, par essence et par présence, caché dans l’être intime de l’âme; par conséquent il faut que l’âme qui doit le trouver sorte de toutes choses, selon l’affection et la volonté, et entre en elle-même dans un très grand recueillement, considérant toutes les choses comme si elles n’existaient pas. C’est pour cela que saint Augustin, parlant à Dieu dans les Soliloques, disait: « Je ne te trouvais pas au-dehors, Seigneur, parce qu’au-dehors je te cherchais mal, puisque tu étais au-dedans. Dieu est donc caché dans l’âme et c’est là que le bon contemplatif doit le chercher avec amour en disant: « Où t’es-tu caché? »
Ô âme, la plus belle d’entre toutes les créatures, toi qui désires tant connaître le lieu où se trouve ton Bien- Aimé pour l’y chercher et t’unir à lui, voilà qu’on te dit que tu es toi-même la demeure où il habite, le lieu secret où il est caché; c’est grande joie pour toi de voir que celui qui est ton bien et ton espérance est si près de toi qu’il est en toi, ou, pour mieux dire, que tu ne peux exister sans lui.. ». (C. S. B St.16-7)
« Fixe ton regard sur Lui… Il est toute ma Parole !» (Jean fait parler le Père)
« Si je t’ai déjà tout dit dans ma parole qui est mon Fils, je n’ai maintenant plus rien à te révéler ou à te répondre qui soit plus que Lui. Fixe ton regard uniquement sur Lui, c’est en Lui que j’ai tout déposé, paroles et révélations ; En Lui, tu trouveras même plus que tu ne demandes et que tu ne désires… Si tu fixes les yeux sur Lui, tu trouveras tout cela ( paroles, visions, révélations ), d’une façon complète, parce qu’Il est toute ma Parole, toute ma réponse, toute ma vision, toute ma révélation. Or, je te l’ai déjà dit, répondu, manifesté, révélé, quand je te l’ai donné pour frère, pour maître, pour compagnon, pour rançon, pour récompense. Le jour où je suis descendu avec mon Esprit sur Lui, au Thabor, j’ai dit : Celui- ci est mon Fils Bien- aimé, en qui j’ai mis tout mon amour, écoutez- le ! ( Mat.17,5.)…
Considérez comment mon Fils m’a obéi et a été affligé par amour pour moi…
Fixez seulement les yeux sur Lui et vous y trouverez les mystères les plus profonds, les trésors de la sagesse et des merveilles divines qui sont renfermés en Lui…Si vous voulez encore d’autres révélations… regardez toujours dans son Humanité, et vous trouverez dans cette Humanité beaucoup plus que vous ne pensez… En Lui habite corporellement la plénitude de la Divinité ‘(Col.2,9.) … Nous devons toujours nous en tenir à ce que le Christ nous a enseigné. Tout le reste n’est rien… » (Livre2 Montée du Carmel ch. 20, 5)
Dans cette recherche, se laisser guider par la foi et l’amour.
“Sachons-le bien, le Verbe, Fils de Dieu réside en compagnie du Père et de l’Esprit-Saint dans l’âme et Il y est caché, et c’est là que le vrai contemplatif doit Le chercher… Que peux-tu désirer encore? Que cherches-tu au-dehors puisque tu possèdes en toi-même le Bien- Aimé que tu poursuis de tes recherches ? Réjouis-toi…Adore-Le en toi-même et garde-toi de Le chercher au-dehors… travaille à rester bien cachée avec Lui » … (CSB 1.6-7-8 )
“ Tu sais maintenant ce que tu as à faire pour trouver l’Epoux dans la retraite de ton cœur; cherche-Le dans la Foi et dans l’Amour…La Foi et l’Amour sont les deux guides d’aveugle qui te mèneront par des chemins inconnus de toi, jusqu’aux secrets abîmes de Dieu…La Foi joue le rôle des pieds qui portent l’âme vers Dieu; l’amour est le guide qui lui montre la route”. (CSB 1,11)
Résonnances dans ma vie :
Dans la lettre adressée à tous les consacrés, le Pape François nous pose cette question : « L’évangile est-il le “vademecum” pour notre vie de chaque jour ?… Jésus nous demande de méditer et de vivre ses paroles… d’apprendre à reconnaître son visage, le visage du Christ qui s’est fait semblable à nous et d’éprouver la joie de nous savoir semblable à Lui, qui par amour pour nous, n’a pas refusé de subir la croix » (Pape François)
« Cette recherche du Bien- Aimé est continuelle…cherchez- Le en toutes choses et ne vous arrêtez à aucune que vous ne l’ayez trouvé…l’âme n’est occupée que de son amour » (Nuit Obscure Livre 2 ch.19,2)
- « Jésus est- il vraiment notre premier et notre unique amour ?
Prière .
“O Dieu et ma Joie,
en ces paroles de lumière et d’amour de toi
mon âme a voulu s’employer pour l’amour de toi.
D’autres personnes, entraînées par elles,
progresseront, peut-être, en ton amour…
Tu aimes, Seigneur, la mesure,
tu aimes la lumière, tu aimes l’amour.
C’est pourquoi ces paroles auront
la mesure nécessaire à la marche,
elles seront lumière pour éclairer le chemin,
et tout au long du chenin elles éveilleront l’amour.
Que restent donc au loin les bavardages
et l’éloquence sèche de l’humaine sagesse,
inconsistante et ingénieuse, qui jamais ne te plaît,
et disons au cœur des paroles baignées
de douceur et d’amour qui tellement te plaisent…”
(Paroles de Lumière et d’Amour, extraits du Prologue).