Marie pour saint Jean de la Croix n°9

Editorial.

    Jean de la Croix est bien « Frère de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont Carmel » comme on les appelait. Dans ses écrits, nous ne trouvons pas un exposé élaboré sur Marie, cependant, elle y est bien présente dans la perspective de l’histoire du salut ; Elle est la Vierge Mère, la Vierge Epouse.

Jean de la Croix voit en Marie, la plus parfaite expression de l’idéal contemplatif et le modèle de la docilité à l’Esprit Saint…

« Telles étaient les prières et les œuvres de  la très Glorieuse Vierge, Notre Dame. Elevée dès le début de son existence à un état si haut, elle n’eût jamais imprimé dans son âme aucune forme créée qui la détournât de Dieu, et elle ne se portait d’elle- même à quoi que ce fût : toujours elle était mue par l’Esprit Saint. » (Montée du Carmel Livre 3, chapitre 2, paragraphe10. Page 790. (Traduction Mère Marie du St Sacrement éd. du Cerf 1990.)

Plus la personne avance vers l’union à Dieu, plus l’Esprit Saint la visite. Elle est illuminée en ses puissances ; mémoire, entendement, et volonté, par les faveurs de Dieu appelées « splendeurs ». Marie « comblée de grâces » est bien celle qui est toute ouverte à l’Esprit Saint et à la volonté de Dieu. A l’Annonciation, l’Ange dit à Marie : « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très Haut te prendra sous son ombre… ». Cette faveur accordée à la Vierge Marie est appelée « obombration » :

« ces splendeurs ( communications de Dieu ) sont d’inestimables faveurs que Dieu accorde à l’âme. On peut leur donner aussi le nom d’ « obombrations », et, selon moi, ce sont les plus hautes qui puissent exister dans cette voie de la transformation… « obombrer » veut dire couvrir de son ombre, ce qui a le sens de protéger et de favoriser. Du moment que l’on couvre de son ombre, c’est  un signe que l’on est tout proche pour favoriser et pour défendre. De là vient qu’il fut dit à la Vierge que la vertu du Très-Haut la couvrirait de son ombre (Luc 1,35), c’est-à-dire que l’Esprit Saint l’approcherait de si près qu’il descendrait sur elle… »   ( Vive Flamme A ou B. Strophe 3,12.)

Jean de la Croix chante l’Annonciation faite à Marie et la naissance de Jésus enfant, œuvre du Dieu- Trinité…

« Alors Il appela un archange qui saint Gabriel se nommait,
et l’envoya à une jeune fille qui s’appelait Marie
et par le consentement de celle-ci le mystère s’accomplissait
dans lequel la Trinité, de chair le Verbe revêtait ;
et bien trois fissent l’œuvre, en un seul elle se faisait ;
Et le Verbe s’incarna dans le ventre de Marie.
Et celui qui avait seulement un Père
Maintenant aussi une Mère avait
Mais non pas comme n’importe qui, qui concevrait d’un homme,
car des entrailles d’elle seule sa chair il recevait
et c’est pourquoi Fils de Dieu et de l’homme on le disait.                                                                              Romance 8.

Naissance et épousailles… Jésus, Fils de Dieu, en naissant de Marie, épouse l’humanité toute entière, cette humanité qu’Il vient sauver…

Maintenant qu’était arrivé le temps où naitre il devait,
comme un époux il sortait de la chambre nuptiale,
embrassant son épouse, dans ses bras il la portait,
lui que la gracieuse Mère dans une crèche déposait
entre les animaux qui alors là se trouvaient.
Les hommes disaient des cantiques,
les anges une mélodie, fêtant les épousailles
qui entre les deux se faisaient.
Mais Dieu là, dans la crèche, pleurait et gémissait ;
C’étaient les joyaux que l’épouse apportait.
Et la Mère s’émerveillait, de ce qu’un tel échange,
elle voyait : les pleurs de l’homme en Dieu
et dans l’homme l’allégresse ;
chose qui à l’un et à l’autre si étrangère d’ordinaire était.                                                                          Romance 9.

Et qui accueillera la femme enceinte la nuit de Noël ?

«  Du Verbe divin enceinte la Vierge
S’en vient en chemin : si vous lui donniez asile !
(Petit couplet écrit à Grenade  page 217 )

Aux noces de Cana, Marie n’adresse pas à son Fils une demande directe ; Elle se contente d’exposer le besoin des autres qu’elle a observé…

« Celui qui aime sagement ne se met pas en peine de demander ce qui lui manque ou ce qu’il désire : il se contente d’exposer son besoin, laissant au Bien- Aimé de faire ce qui lui plaira. La bienheureuse Vierge en agit ainsi aux noces de Cana, en Galilée. Elle n’adressa pas à son Fils de demande directe ; elle se contenta de lui dire : Ils n’ont plus de vin” (Jn 2,3). 
( Cantique Spirituel 2,8.)

Bien que l’état de l’âme de  la Vierge Marie,  toute unie à son Dieu et à sa Volonté ne comporte pas la souffrance, Dieu a permis que cette Mère s’unisse au chemin de croix de son Fils…

« …il est vrai qu’il se rencontre des circonstances où Dieu permet qu’elle sente vivement les choses et en souffre. Il en agit ainsi envers la Vierge sa Mère… » (Cant.Spirituel B 20-10 ou CS A 29,7)

Dans sa belle Prière de l’âme embrasée d’amour, Jean de la Croix s’écrit avec certitude :

« … Les anges sont à moi et la Mère de Dieu est à moi. Tout est à moi.
( Ecrits spirituels n° 26 dans Traduction M. Marie du St Sacrement éd. du Cerf 1990)

Prière de l’âme embrasée d’amour (Jean de la Croix.)

« Seigneur, Dieu, mon Bien- Aimé !
Si le souvenir de mes péchés
T’empêches de m’accorder la grâce que je sollicite,
accomplis Ta volonté, car c’est là ce que je préfère.
Et cependant, j’ose T’en supplier, donne lieu à ta Bonté,
à ta Miséricorde, de resplendir dans le pardon
que Tu m’accorderas… Tu ne me retireras point,
mon Dieu, ce que Tu m’as une fois donné
en me donnant ton Fils unique,
Jésus-Christ, en qui Tu m’as donné
tout ce que je puis désirer.
Aussi, je veux me réjouir, car Tu ne tarderas pas,
si je T’espère véritablement… 
Et toi qu’attends-tu, puisque dès maintenant
tu peux aimer Dieu dans ton cœur ?
Les cieux sont à moi et la terre est à moi.
A moi les nations, à moi les justes, à moi les pécheurs.
Les anges sont à moi et la Mère de Dieu est à moi.
Tout est à moi. Dieu est à moi et pour moi,
puisque le Christ est à moi et tout entier pour moi (cf. 1 Co 3, 22-23).
Après cela, que demandes-tu et que cherches-tu, mon âme ?
Tout est à toi et entièrement pour toi.
Sois fière et ne t’arrête pas aux miettes qui tombent de la table de ton Père.
Sors et glorifie-toi de ta gloire.
Réjouis-toi, et tu obtiendras ce que ton cœur demande (Ps 36, 4).
Ainsi soit-il. »
(Ecrits spirituels n°26- Trad. Marie du Saint Sacrement-  éd. Cerf 1990- page 272-273)

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