Editorial
Après avoir accueilli en février l’enseignement d’une grande richesse, de Saint Jean de la Croix sur la vraie joie, à partir de “la montée du Carmel”, tournons-nous vers Thérèse de l’Enfant Jésus de la Sainte Face, digne fille du grand mystique espagnol. Ne dit-elle pas à l’âge de 17/18 ans : « Je n’avais pas d’autre nourriture spirituelle… » MsA 83r°)
Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus affirmait au cours de sa maladie « Tout le monde m’aimera »… Et cela se vérifie. Elle a beaucoup à nous partager sur sa manière toute personnelle concrète et simple de cultiver la Joie le fruit de l’Esprit (Gal. 5 /22)
La source de la joie de Thérèse, c’est Dieu Lui-même. « Soyez toujours joyeux, priez sans cesse en toute circonstance, soyez dans l’action de grâces …(1Th5/16-17) nous dit Saint Paul et Jésus a exprimé son désir « Que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite ! » Jn 15/11
Voyons comment Thérèse a cultivé la joie pour, nous aussi, nous y exercer. Thérèse a commencé à découvrir le chemin de la vraie joie, lors de sa conversion la nuit de Noël 1886.
Elle écrit : « Je sentis un grand désir de travailler à la conversion des pécheurs… Je sentis en un mot la charité entrer dans mon cœur, le besoin de m’oublier pour faire plaisir et depuis lors je fus heureuse » (MsA 45 v°) Le besoin de s’oublier, lieu de communion avec Jésus source de toute joie !… Pour Thérèse tout est une question d’amour. Accueillir l’amour de Dieu dans le quotidien et rendre amour pour amour. Cela n’élimine pas les épreuves ni la tristesse, Thérèse a compris qu’une certaine tristesse n’est pas forcément, péché puisque, Jésus lui-même, l’a connue au Jardin des Oliviers. Elle peut affirmer : « La vie est pleine de sacrifices, c’est vrai ! Mais quel bonheur ! » (LT 49) Cela veut dire qu’en toute situation nous pouvons : « trouver délicieuse la part que Dieu nous donne ». C’est tout un art ! Mais pour la joie comme pour le reste, on ne cultive rien sans efforts !
Quand Thérèse parle de la joie, elle la rayonne. Il ne faut pas oublier que pour elle le but de sa vie est de faire plaisir à Jésus et de travailler avec Lui. Lorsque le 9 avril 1888 elle entre au carmel, elle dit : « Avec quelle joie profonde je répétais : «c’est pour toujours, toujours, que je suis ici»(MsA 69 v° Joie du don total qui demande à Thérèse, qui n’a que 15 ans, un véritable arrachement affectif mais d’où la joie n’est pas absente !
Elle parle aussi de la joie de se savoir petite, imparfaite, aimée de Dieu…Au cœur même de sa pauvreté : « Je me résigne à me voir toujours imparfaite et j’y trouve ma joie » (MsA 74) Expérimenter sa fragilité, sa vulnérabilité est un chemin de libération pour une certaine joie intérieure : « Ma joie est de rester petite. Aussi, quand je tombe en chemin, je puis me relever bien vite. Et Jésus me prend par la main. Alors le comblant de caresses, je lui dis qu’il est tout pour moi et je redouble de tendresse, quand il se dérobe à ma foi »(PN 45 /4 )
« Quelle douce joie, que de penser que le bon Dieu est juste ! c’est-à-dire qu’il tient compte de nos faiblesses, qu’il connaît parfaitement la fragilité de notre nature… De quoi aurais-je peur ? … »( MsA 83v°). Oui, en toute situation qui bouscule, la certitude d’être aimée de Dieu, qui tient compte de nos faiblesses, est source de paix et de joie.
Thérèse nous parle de la joie parfaite au cœur de la tempête. Se comparant à un petit oiseau : « Parfois, il est vrai, le cœur du petit oiseau se trouve assailli par la tempête, il lui semble ne pas croire qu’il existe autre chose que les nuages qui l’enveloppent… C’est alors le moment de la joie parfaite pour le pauvre petit être faible ! ! Quel bonheur pour lui de rester là quand même à fixer l’invisible lumière qui se dérobe à sa foi ! ! (MsB 5r° ») C’est l’expérience d’une joie dépouillée sous le regard d’amour de Dieu, (lumière pour traverser nos tempêtes intérieures.)
La joie ne supprime pas la souffrance, elle vient plutôt l’habiter : au moment si douloureux de la maladie de son papa, elle écrit à Céline : « Souffrons en paix… Qui dit paix, ne dit pas joie, ou du moins joie sentie… Pour souffrir en paix, il suffit de bien vouloir tout ce que Jésus veut … Pour être l’épouse de Jésus il faut ressembler à Jésus… Il est couronné d’épines ! … »( LT 87). C’est dans cette réalité que la joie de Dieu envahit peu à peu, silencieusement, tout l’être. Croyons-nous à cet amour gratuit et permanent du Seigneur pour accueillir chaque minute comme lieu où nous pourrons oser croire que : « Tout est grâce », attitude à cultiver…
Quand Thérèse écrit « Ma Joie » elle est très malade et dans l’épreuve de la foi. Il lui reste huit mois à vivre. Cependant elle affirme : « Il est des âmes sur la terre / qui cherchent en vain le bonheur / pour moi c’est tout le contraire / la joie se trouve dans mon cœur / cette joie n’est pas éphémère, / je la possède chaque jour / » … la joie jaillit de l’intérieur du cœur profond, là où Dieu demeure.
Le 30 juillet elle dit en montrant un verre avec un remède très amer mais qui ressemblait à une délicieuse liqueur de groseilles : «Ce petit verre là, est l’image de ma vie. Aux yeux des créatures, je buvais des liqueurs exquises… Et c’était de l’amertume. Je dis de l’amertume, mais non ! car ma vie n’a pas été amère, parce que j’ai su faire ma joie et ma douceur de toute amertume. » Voilà un des secrets de Thérèse. On retrouve la même attitude (PN 45) « J’accepte avec reconnaissance/les épines mêlées aux fleurs/… « Lorsque le ciel bleu devient sombre / et semble me délaisser / ma joie est de rester dans l’ombre / de me cacher, de m’abaisser / ma joie c’est la volonté sainte / de Jésus mon unique amour…
Fausse joie et véritable joie… Elle confie à sa prieure en se comparant à une petite fleur « Toutes les créatures peuvent se pencher vers elle, l’accabler de louanges je ne sais pourquoi, mais cela ne saurait ajouter une seule goutte de fausse joie à la véritable joie qu’elle savoure en son cœur, se voyant ce qu’elle est aux yeux de Dieu : un pauvre petit néant rien de plus… PN45-5
« Ma joie est de le voir sourire/ lorsque mon cœur est exilé. »
Il n’y a que l’Esprit Saint qui peut produire en nous son fruit de paix et de joie, par l’accueil de la Parole de Dieu longuement goûtée et méditée au cœur de nos vies.
A la fin de sa vie Thérèse qui a constamment lutté pour cultiver la joie : « Ma joie est de lutter sans cesse… Ma seule joie sur cette terre / c’est de pouvoir te réjouir / » (PN 45 -6-7) Elle rayonne la joie spontanément, elle réconforte ses sœurs malgré ses souffrances…
Quelle est la source de cette joie ? « L’amour ! … ce feu de la Patrie /ne cesse de me consumer / que me font la mort ou la vie ? / Jésus, ma Joie, c’est de t’aimer ! »
Résonance
Dans notre monde, qui facilement cultive le pessimisme, est-ce que, avec Thérèse, je peux demander au Seigneur qu’il suscite en moi ce désir de cultiver la joie ? … pour la rayonner, et pouvoir dire :
« L’unique bonheur sur cette terre,c’est de s’appliquer à toujours trouver délicieuse, la part que Jésus nous donne » (LT 257 du 17 .02.1897)
Prier avec Thérèse
Mon ciel est de pouvoir attirer sur les âmes,
Sur l’Église, ma Mère et sur mes sœurs
Les grâces de Jésus et ses divines flammes
Qui savent embraser et réjouir les cœurs. PN 32-2)
Vivre d’amour, c’est naviguer sans cesse
Semant la paix, la joie dans tous les cœurs (PN 17-8)