Editorial
Maîtresse de vie spirituelle, Sainte Thérèse d’Avila, dans sa vie et son enseignement témoigne que vie d’oraison, «vie d’amitié avec Dieu » et vie fraternelle sont inséparables. « A nous, le Seigneur ne demande que deux choses : l’amour de Dieu et l’amour du prochain. C’est là que nous devons porter nos efforts».
Difficile de synthétiser la pédagogie de l’amour dans ses écrits. Dans ce premier feuillet, nous nous limiterons à quelques extraits du Chemin de la Perfection écrit pour des apprenties en vie communautaire et en vie contemplative au Carmel Saint Joseph ; Carmel où Thérèse vient d’instaurer un nouveau style de vie communautaire. Dans le prochain feuillet nous nous arrêterons sur quelques extraits du Château Intérieur.
Dans les chapitres 4, 6 et 7 du Chemin de la Perfection, écoutons ce qu’elle nous dit de la vie fraternelle.
« Vous m’avez demandé de vous parler un peu de l’oraison. Avant de parler de l’intérieur, qui est l’oraison, j’exposerai certaines choses qui sont nécessaires à celles qui prétendent suivre le chemin de l’oraison… si nécessaires, qu’elles les feront aller très loin dans le service du Seigneur sans être très contemplatives ; mais il est impossible d’être très contemplatives sans cela …
Je n’insisterai que sur trois points…, car il est essentiel de comprendre combien il importe de les observer pour vivre intérieurement et extérieurement dans la paix que le Seigneur nous a tant recommandée. L’une est de nous aimer les unes les autres ; l’autre, le détachement de toute chose créée, l’autre, la véritable humilité …
La première, qui est de beaucoup vous aimer les unes les autres, est d’extrême importance ; car il n’est chose fâcheuse qu’on ne supporte facilement quand on aime, il en faut beaucoup pour nous fâcher. Si le monde observait ce commandement comme il le doit, je crois que cela aiderait beaucoup à observer les autres. Dans nos maisons …toutes doivent être amies, toutes doivent s’aimer, toutes doivent s’entraider; et qu’elles se gardent des préférences, pour l’amour du Seigneur, … si l’inclination nous porte davantage vers l’une que vers l’autre …nous devons beaucoup y résister et ne pas permettre que cette affection nous domine. Aimons les vertus, les qualités intérieures, et appliquons-nous toujours à éviter de faire cas de l’extérieur…. Ne consentons pas, à ce que notre volonté soit esclave de quiconque,…
Aimer, c’est la passion d’agir pour qu’une âme aime Dieu et en soit aimée ;… nul autre amour ne dure; cet amour leur coûte très cher, elles font tout ce qu’elles peuvent pour qu’il soit un bienfait ;…Ô précieux amour, à l’imitation du capitaine de l’amour, Jésus, notre bien!
Voilà la manière d’aimer que je voudrais pour nous; même si elle n’est pas parfaite au début, le Seigneur la perfectionnera. Commençons par les moyens de l’obtenir ; un peu de tendresse ne nuira point, si elle se manifeste en général. Il est bon et nécessaire de mêler parfois de la tendresse à l’affection, et même d’en ressentir, et de compatir à certaines épreuves ou maladies, même légères, des sœurs ; car il arrive que des choses très légères causent à l’une autant de peine qu’une autre en éprouverait d’une grande épreuve, la nature de quelques personnes les porte à beaucoup s’affliger de pas grand-chose. Si la vôtre est à l’opposé ne manquez point de compatir ; si par chance Notre-Seigneur veut nous préserver de ces peines, nous en éprouverons d’autres, et celles qui seront graves pour nous et graves en soi seront légères pour une autre. Ne jugeons donc point de ces choses de notre point de vue…
Tâchez aussi de vous réjouir avec vos sœurs lorsqu’on leur accorde une récréation nécessaire, à l’heure habituelle, même si cela n’est pas de votre goût, …; sachez comprendre quelles sont chez vos sœurs les choses dignes de vous toucher et de vous apitoyer, et compatissez toujours beaucoup à la moindre des fautes que vous verrez en elles, si elle est notoire. C’est là, dans la façon de supporter ces fautes sans s’en épouvanter que se manifeste et s’exerce l’amour; les autres en feront autant des vôtres qui, sans que vous vous en doutiez, doivent être bien plus nombreuses que les leurs, et recommandez bien votre sœur à Dieu, en vous efforçant de pratiquer la vertu opposée à l’erreur qui vous est apparue en elle ; tâchez d’agir ainsi pour l’instruire par des actes.
Oh! le bon et véritable amour que celui de la sœur dont l’exemple profite à toutes les autres, qui s’oublie dans leur intérêt, qui les aide à progresser dans toutes les vertus et à observer leur Règle avec une grande perfection !
Une autre très bonne preuve d’amour, c’est de tâcher de leur épargner du travail en assumant soi-même certains offices de la maison, et aussi de se réjouir et de beaucoup louer le Seigneur de leurs progrès dans la vertu. Toutes ces choses-là, en plus des grands bienfaits qu’elles nous apportent, contribuent beaucoup à établir la paix et l’harmonie, comme l’expérience nous le prouve…. Plaise à Sa Majesté de nous maintenir dans cette voie, car le contraire serait terrible; la mésentente d’un si grand nombre de religieuses serait dure à souffrir ; plaise à Dieu de ne pas le permettre.
Si par hasard, soudain, un mot blessait, apportez le remède aussitôt, et faites longuement oraison ; et si n’importe laquelle de ces choses qui s’installent apparaissait, clans, envie de se donner de l’importance, petit point d’honneur …. Criez vers Sa Majesté ; cherchez un remède…
Parole du Pape François dans « La Joie de l’Evangile » :
« Je désire demander spécialement aux chrétiens de toutes les communautés du monde un témoignage de communion fraternelle qui devienne attrayant et lumineux.
Que tous puissent admirer comment vous prenez soin les uns des autres, comment vous vous encouragez mutuellement et comment vous vous accompagnez : « A ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres .» (Jean 13.35)
Résonance pour notre vie
L’enseignement de Thérèse s’adresse à tous les chrétiens. Pour moi aujourd’hui, quels appels pour renouveler certains aspects de ma vie fraternelle ?
Seigneur Jésus, Tu nous as dit : « aimez vous les uns les autres, comme je vous ai aimés ».
Rappelle-nous ta Parole. Donne-nous de savoir ouvrir l’Evangile pour Te regarder aimer, pour voir qui Tu aimes, comment Tu aimes.
Apprends-nous à vivre en frères. Fais de nous des artisans d’unité, des témoins de ton amour.